DA et IA, ensemble en agence ?

Quel est le rôle des créatifs face à l’essor de l’intelligence artificielle ? Seront-ils remplacés, l’IA est-elle à bannir radicalement, est-il possible de trouver une collaboration harmonieuse entre les deux ?

Je me suis rendue progressivement compte que Castor & Pollux s’inscrit dans cette troisième option. D’abord surprise, puis intriguée, je me suis intéressée aux différents cas où l’agence a pu solliciter l’aide de l’IA.

Il existe divers types d’IA pour des tâches spécifiques. À plusieurs reprises C&P a souhaité sensibiliser son public à ce sujet, comme par la conférence Tôpic pour ses clients proches, ou via ce site, développé par l’agence, recensant cinq intelligences artificielles et invitant l’utilisateur à déterminer si le contenu présenté a été fait par un humain, par une IA, ou par une collaboration des deux. 


Certaines IA permettent de doubler dans une autre langue, de recréer complètement une voix, de générer des avatars humains parlants, de produire de la musique et des paroles, de décortiquer un site web existant, et les plus courantes que nous connaissons aujourd’hui, capables de générer du texte et des images.

Chez Castor & Pollux, seules les trois dernières ont été utilisées dans le cadre d’appels d’offres ou de productions pour un client. Surpris, inquiet ? Moi aussi je l’étais au premier abord. Lors de la présentation des travaux, si une partie du contenu est générée par IA, les éléments concernés seront indiqués comme “assistés par IA”. Le client a son mot à dire s’il ne souhaite pas de contenu par intelligence artificielle dans les propositions, mais généralement un accord préalable est trouvé entre lui et l’agence.

Du point de vue du client, faire appel à une agence nécessite souvent un investissement financier conséquent, parfois insuffisant pour couvrir des productions coûteuses comme des photographies in situ ou du contenu 3D. C’est ici que l’IA intervient. D’un point de vue économique, le contenu généré par IA est bien moins coûteux, nécessite moins de préparatifs et est produit plus rapidement. Cependant, cela soulève la question cruciale : quel est le rôle des créatifs dans ce processus ?

Prenons un exemple concret d’un appel d’offres récemment remporté par l’agence. Un client, disposant d’une entreprise spécialisée dans les cours particuliers, souhaitait un nouveau logotype, une nouvelle DA, un site web, ainsi que différents avatars.

Pour ce projet, Emeline et Noé ont d’abord travaillé sur le logo et l’UX/UI du site web. Le problème est survenu lors de la conception des avatars. Le budget que le client pouvait fournir était insuffisant pour engager un illustrateur ou un artiste 3D (dont l’agence ne dispose pas en interne). D’un commun accord, il fut alors décidé d’utiliser l’IA Midjourney pour produire une base d’avatar.

Cependant, Emeline ne se contente pas d’écrire un simple prompt (des instructions ou une série de données fournies à l’IA) et récupérer la première image générée… Sans rentrer dans trop de détails, Midjourney propose quatre images. La personne derrière son écran sélectionne l’image qui l’intéresse le plus, et ajoute ensuite de nouvelles instructions pour ajouter ou ôter certains éléments. Certaines choses pouvant jouer grandement sur le résultat sont le style (photographie, peinture, style 3D…), la lumière (tamisée, froide, dirigée…), l’angle et le cadrage (plan rapproché, portrait, fisheye…) et plus encore.

Dans ce cas précis, l’utilisation de l’IA dans le projet résulte d’un manque d’argent. Argent qui certes aurait pu payer un artiste, mais qui du point de vue du client, ne pouvait être remis. Selon la perspective choisie, l’IA empêche à un artiste de réaliser son travail, mais elle permet au client d’obtenir ses avatars à un moindre coût. L’intelligence artificielle se retrouve alors au sein d’un étrange paradoxe, à la fois “cruelle” et utile.


Récemment j’ai appris à me servir de Midjouney avec Quentin et Noé. La mission était de générer des visuels de plats pour un lot de recettes proposées par l’un de leurs clients (ce dernier n’étant à l’origine pas spécialisé dans la restauration). 

Processus de création de visuels par Midjourney

Les visuels générés peuvent également servir pour des mockups, ou des inspirations de cadrages photos à ensuite prendre insitu. Ce fût notamment le cas pour les clients cuisinistes de la dernière fois, où C&P souhaitait leur proposer de prendre leurs futures photos de manière très géométrique, en accord avec leur proposition de DA.

Prompt en anglais destiné à Midjouney

D’autres exemples, qui paraîtront moins controversés quant à l’usage de l’IA au sein de l’agence, sont l’utilisation de Magnific et de Perplexity

La première aide à agrandir une image floue et ajouter certains détails si besoin, ce qui est idéal pour améliorer des visuels de mauvaise qualité. La seconde, similaire à ChatGPT, permet de répondre à des questions actuelles (contrairement à l’autre IA dont les connaissances sont limitées à 2022), de fournir ses sources internet en appui à ses réponses, et de décortiquer un site web, quelle que soit la langue, lorsqu’on lui fournit une URL.

La capacité de Perplexity à analyser un site web a notamment permis à Noé de comprendre ce que réalisait un client dont le site web original comportait de nombreuses pages aux sujets complexes et spécifiques.

Pour conclure, la relation entre DA et IA au sein de Castor & Pollux démontre qu’une collaboration harmonieuse est possible. L’intelligence artificielle, lorsqu’elle est utilisée judicieusement, peut être bénéfique, permettant ainsi la réalisation de certains projets. Cela soulève néanmoins des questions sur le rôle des créatifs et l’impact potentiel sur les emplois artistiques.

Au cœur de la mode avec MOLLI

MOLLI une histoire centenaire

Depuis le 8 avril, je travaille dans la maison MOLLI, située dans le 7 arrondissement
de Paris,
à 5 minutes à pied de l’hôtel des Invalides.

carte de paris

« MOLLI est une maison au savoir-faire unique dans l’art du tricot
depuis ses origines, molli tricote des vêtements en maille fine
d’une extrême qualité. »

« Charlotte de Fayet reprend la marque centenaire pour lui tricoter un nouveau chapitre. Cette amoureuse inconditionnelle de MOLLI, entourée d’une équipe de femmes, réinvente de saison en saison un vestiaire composé de vêtements en maille fine, délicate et texturée.
La marque est vendue dans quatre boutiques à Paris
et aux quatre coins du monde. »

https://www.molli.com/pages/molli-depuis-1886
zone géographique de MOLLI dans le monde

À mon arrivée,j’ai été assez surprise par la surface du bureau qui est disposé en longueur.
On entre tout d’abord dans un couloir qui mène au bureau de Corinne, chargée des ressources humaines, et de Maryten et Raphëlle en charge des finances et des fournisseurs.
Ensuite, le couloir donne accès aux différentes pièces principales : le bureau com/web
où je travaille avec Yasmine, Aglaé, Fanny, Sonia et Marion, l’atelier des stylistes, la tente
(qui est un lieu de réunion ou pour se reposer), le bureau de Charlotte qui a racheté et détient maintenant MOLLI depuis 10 ans, et Noémie, celle qui gère également la marque en assistant Charlotte. Ensuite, on arrive au showroom où sont exposées les dernières collections (confidentielles à l’heure actuelle), puis à la cuisine avec la terrasse.

le bureau
le bureau

Ma tutrice est Yasmine, la directrice artistique chez MOLLI depuis plus d’un an,
qui m’a directement mise à l’aise et mise au travail par la même occasion en commençant
par m’expliquer le drive sur lequel elles travaillent (oui, MOLLI est 100 % girl power ! ). Charlotte souhaite enregistrer l’ensemble de ce qui est fait chez MOLLI depuis 2014, lorsqu’elle a repris la marque. Ah oui ! Par ailleurs, MOLLI est une marque qui existe depuis 1886,
et Charlotte souhaite la rendre la plus moderne et attrayante possible tout en conservant l’aspect artisanal des mailles, qui est la technique utilisée par la maison.

la team com / web

Avec cette première vision sur le drive, je me suis rendu compte d’un point plus qu’important. Si je me trompe d’emplacement pour ranger le fichier ou s’il ne répond pas aux attentes des filles et surtout à celles de Charlotte, cela peut donc retarder l’envoi aux fournisseurs,
à la presse, aux femmes influentes avec qui nous travaillons… Ainsi, l’objet d’étude
que je souhaite aborder dans cette note est l’aspect que, du point de vue du graphiste, l’ensemble d’un projet, que ce soit pour les réseaux sociaux, le site web, la presse…
doit être bien réalisé et surtout respecter les délais afin de ne pas impacter l’ensemble
du bureau.

Ce qui me plaît beaucoup chez MOLLI, c’est que nous devons toutes travailler ensemble
d’une certaine manière et répondre aux attentes, par exemple du pôle RH qui a une demande du fournisseur pour une étiquette, ou une demande des filles qui s’occupent des relations internationales et qui ont besoin d’une carte d’envoi de presse afin de présenter un nouvel arrivage d’un haut, une demande de Charlotte qui souhaite réinvestir la charte graphique
dans de nouvelles présentations pour, par exemple, regrouper l’ensemble de la papeterie
et des packaging afin de retrouver les différents formats, matières, fournisseurs…

En tout cas, même si cela ne fait que trois semaines que j’ai commencé, je m’y sens vraiment bien et très intégrée dans l’équipe (j’ai même un premier appel avec Charlotte, Noémie, Fanny qui s’occupe du web, les fournisseurs packaging et papeterie et moi-même en tant que graphiste, car ma tutrice sera en vacances. Pas trop de pression franchement ! ).

Je pense réellement que ce stage me sera bénéfique en terme de relationnel et de travail.

MOLLI
MOLLI

Conserver une identité cohérente

En vue de cette dernière semaine de stage qui commence, mes questionnements se portent maintenant plus précisément sur les projets en tant que tels.

Ce dernier mois, j’ai surtout pu travailler sur le projet concernant l’Abbaye des Vaux-de-Cernay, un hôtel spa dont l’agence a dû réaliser toute l’identité visuelle et la charte graphique. Cette dernière avait déjà été réalisée avant mon stage et aujourd’hui le projet se porte essentiellement autour de la création des supports de communication.

Un petit aperçu de ce que j’ai pu faire sur l’Abbaye du 14 juin à maintenant

Pour revenir sur mon questionnement, j’ai notamment pu me demander comment on pouvait gérer des projets aussi complexes que ceux-ci, qui peuvent durer depuis déjà plus d’un an.

Plus de 70 supports à décliner en suivant la charte graphique

C’est tout d’abord en travaillant sur 12 menus que j’ai pu prendre conscience des dates fixées qui sont très souvent décalées, tout d’abord à cause des retours client qui demandent des modifications ou bien qui n’envoient pas les contenus pour la réalisation des éléments, ce qui nous bloque complètement. Le client nous demande régulièrement des présentations de l’avancée pour suivre son projet, certaines modifications sont faites à la dernière minute. Cependant, c’est plutôt agréable d’avoir un client aussi réactif, ce qui n’est pas toujours le cas, car cela nous permet de nous adapter plus facilement à sa demande.

Toutes les infos sont placées dans des tableurs qui évoluent à chaque retour

On doit être assez organisé pour n’oublier aucune modification demandée. Il faut très fréquemment qu’on revoie nos plannings qui dépendent des retours du client et très généralement se plier à leurs exigences, notamment lorsqu’ils préfèrent choisir un papier plutôt que celui qu’on propose.

Pour être organisé, on doit aussi collaborer pour optimiser au plus notre temps. C’est sur ce projet où j’ai pu le plus travailler avec les autres graphistes de l’agence, actuellement, nous sommes quatre sur les déclinaisons.

Pour avancer assez rapidement, on se fait beaucoup de retours entre nous, même sur des petits détails, on réalise aussi beaucoup de maquettes pour se rendre compte de l’objet fini, particulièrement pour régler les tailles des différents éléments ou même se rendre compte de la cohérence des supports.

Pour optimiser le temps et créer une cohérence avec l’identité mise en place, j’ai notamment pu créer deux principes de mises en page différents, un pour les boissons et un pour la nourriture, qui se déclinent selon les identités de chacun des restaurants.

C’est aussi en gérant le projet dans son intégralité qui en fait quelque chose de complexe. De la mise en page au choix de papier, d’embossage et de tissus.

De plus, lors de la conception des menus, après les retours du client, la plupart des menus sont finalement passés en attente, la moitié de l’hôtel ouvrira finalement au printemps, et pour l’autre partie le contenu n’a toujours pas été défini et on doit donc attendre les éléments.

En plus d’être organisés entre nous, on doit donc aussi prévoir en amont les menus, mettre en page des éléments pour donner une idée de la réalisation finale au client et ensuite gagner du temps sur l’ajout des vrais contenus. C’est un travail qui prend aussi du temps, mais qui n’est pas urgent et nous permet de travailler dessus lorsque le travail vient à manquer dans d’autres projets, on peut donc passer plus de temps à élaborer des choses plus intéressantes sur ces supports.

Finalement, ce qui m’a le plus marqué, c’est que les clients demandaient des choses beaucoup plus simples que ce que l’on faisait comme propositions, retirant dans la plupart des cas tout l’aspect graphique qu’on avait pu ajouter, pour finalement uniformiser tous les supports et on finit par perdre l’identité qu’on voulait mettre en place pour chaque restaurant, en ne gardant par exemple que deux types de papiers et une seule couleur d’embossage pour tous les menus. C’est toujours un peu frustrant de retirer la moitié de ce qu’on avait pu passer des heures à faire, le projet appartient en premier au client et on n’a pas vraiment notre mot à dire.

C’est un projet qui est donc assez long et complexe par son nombre de supports de communication, et finalement beaucoup moins par sa créativité en tant que telle qui est plutôt limitée par les choix du client.

L’ÉQUIPE

  1. L’ÉQUIPE HABILE

NOTE D’INTENTION 11/06

Faire partie d’une équipe c’est participer à un grand projet. 

Et qui dit faire partie d’une équipe dit apprendre des autres, on est actuellement six stagiaires et quelques engagés. On s’est créer un genre de petit groupe avec qui on peut partager des avis, montrer nos réalisations et avoir des retours direct de personnes qui ne suivent pas forcément chaque projet. On peut donner son avis, recevoir des critiques, avancer, partager.

L’équipe se constitue de : – ÉRIC&CAMILLE : les boss – EULALIE&LAURE : les graphistes – GWENDOLINE : l’assistante styliste – FÉLIX ET ABY : les vendeurs – ILIÈS : le serveur – VINCENT : le sommelier – LES NOUVEAUX : les commis de cuisine.

Depuis ces quelques on peut dire que j’ai appris, on a :

Rangé et compris l’organisation des vins et de leurs cépages, passer des commandes, aller chercher des b.a.t, poser des autocollants de façade, dessiné et construit des flèches en bois, repassé des panières à pain, penser la tailles de badges, structuré une newletter, changé le mode d’affichage d’une télé, réglé et se servir d’une machine à café, faire un Qr code, acheté une clé usb, accroché des hand-tags, rempli des dizaines de moodboard, animé de home-pages de site, codé sur des applications nouvelles (pas plus simple), dirigé un photographe, rempli des tableaux Excel, fait une grille instagramable, construit un panneau d’entrée, démarché des imprimeurs, allé à des rendez-vous professionnels, comparé le prix du marché, testé tous les cookies du coin, rigolé, s’être trompé, recommencé,

2) PENSER LE APRÈS

Maintenant il va falloir envisager une autre facette du travail en équipe, qui est l’« après ». Comment notre travail persistera après la fin de notre stage, bien ranger et organiser nos fichiers pour qu’ils soient repris et compris. Comment réfléchir à une structure modifiable et transformable pour tout ce qu’il auront besoin d’en faire. C’est faire en sorte que l’identité reste ce qu’elle est aujourd’hui. Et que la boutique puisse garder son ensemble graphique.

CHACUN À SON MOT À DIRE !

La bienveillance au travail

Depuis des siècles, la bienveillance est un terme discuté par les philosophes: Aristote qualifiait de bienveillant “celui qui voulait faire le bien de l’autre” quand Confucius en faisait un impératif en écrivant “la bienveillance est sur le chemin du devoir”. Plus près de nous, ce mot est défini sur Wikipédia comme “ la disposition affective d’une volonté qui vise le bien et le bonheur d’autrui”. Ce terme paraît simple et pourtant, lorsqu’il s’agit du monde du travail, il n’est pas toujours au cœur des préoccupations. Durant mon stage, j’ai eu la chance d’évoluer au sein d’une équipe extrêmement bienveillante et pédagogue. J’ai également la possibilité de pouvoir comparer cette expérience professionnelle avec mes précédentes, ayant déjà effectué 3 stages durant ma scolarité (celui-ci compris). À partir de mes expériences, ce thème de la bienveillance m’est apparu comme primordial lorsque l’on évolue dans le monde du travail. De ce fait, on peut se demander si la bienveillance au travail améliore réellement les résultats d’une entreprise ainsi que l’état d’esprit de ses employés ?

Mes 2 premiers stages, (s’étant respectivement déroulés dans une librairie puis dans une maison d’édition) ne s’étaient pas passés de la meilleure des façons. Je sentais continuellement du jugement, parfois même du mépris. Évidemment cela engendrait du stress, la peur de faire des erreurs ou encore une perte de confiance en moi lorsque je me trompais. Malgré l’application dont je faisais preuve, je commettais constamment des erreurs et par conséquent me faisais réprimander. Le monde du travail m’apparaissait alors comme ingrat et injuste et je n’avais en aucun cas envie d’en faire partie. L’expérience que j’ai vécue chez Gédéon était toute autre : il m’arrivait de faire des erreurs bien évidemment, mais bien moins fréquemment que lors de mes expériences passées et de plus, je ne les percevais jamais comme des erreurs à proprement parlé étant donné que personne ne me faisait ressentir que c’en était. C’était à chaque fois, un moyen d’apprendre et non pas un moment désagréable et négatif. La bienveillance qui émane de l’équipe ainsi que le climat très convivial m’a réellement étonné au départ. Au sein de l’entreprise, tout le monde est généreux les uns envers les autres, on retrouve beaucoup d’entraide et de rigolade. Dans cette agence, j’ai eu l’impression d’intégrer une bande d’amis plutôt qu’une entreprise. Je n’ai jamais ressenti aucune pression, on ne m’a jamais fait aucun reproche.

Dans mon cas, il est donc certain que la bienveillance m’a permis d’être plus productive. En effet, un tel climat permet d’accorder une place importante à la discussion, ce qui par extension accélère les processus de travail et améliore les résultats des salariés. De plus, je n’ai jamais ressenti de réelle hiérarchie au sein de l’équipe : Emmanuelle, la directrice de Gédéon était tout aussi accessible que les cheffes de projets ou les directeurs artistiques. Cela renforce la cohésion de groupe et facilite toujours plus l’échange et le partage. Une étude du MIT affirmait que « les salariés heureux sont 2 fois moins malades, 6 fois moins absents, 9 fois plus loyaux, 31 % plus productifs, et 55 % plus créatifs ». Les entreprises auraient donc tout à gagner en adoptant une attitude bienveillante, réduisant ainsi, l’anxiété, l’absentéisme et surtout les burn out. 

Avec de tels chiffres, il est donc naturel de se demander pourquoi toutes les entreprises n’adoptent-elles pas cet état d’esprit ? En effet, il existe encore de nombreuses entreprises qui ne cultivent pas la bienveillance au quotidien. Certaines pensent qu’il est plus productif de mettre en compétition les salariés, misant plus sur la peur, le mépris et l’angoisse pour pousser au travail bien fait. En discutant avec mes collègues pendant un repas, j’ai entendu une histoire qui m’a réellement choquée: l’un de mes collègues avait vécu une expérience tout à fait malsaine dans son précédent emploi. Il était en stage avec un autre stagiaire lorsque son patron les convoqua tous les deux dans son bureau pour leur poser la question suivante: lequel de vous deux devrais-je garder ? Ils se sont donc retrouvés dans une situation ou chacun devait “vanter” ses mérites tout en essayant de rabaisser l’autre afin de se mettre en valeur au maximum. Cette joute verbale visait à mettre en avant leur esprit compétitif et favorisait (selon moi) la personne ayant le moins d’empathie et de bienveillance. Pourquoi alors, employer de telles méthodes ? Même s’il a été prouvé que la bienveillance engendre des effets positifs sur les résultats d’une entreprise, elle demande de faire quelques adaptations pouvant être vue comme des inconvénients. En effet, elle nécessite notamment d’impliquer les émotions des individus dans la sphère professionnelle, ce qui peut ne pas plaire à tout le monde. De ce fait, il est intéressant de se demander jusqu’à quel point peut-on inclure les émotions dans le monde du travail ? Certaines personnes s’appliquent justement à séparer de manière drastique leur vie professionnelle et leur vie personnelle, il serait donc assez compliqué pour eux de devoir considérer leurs collègues comme des “amis”. De plus, de par l’éducation et les expériences vécues par chacun, cela peut être une motivation que de travailler dans la compétition.

Enfin, la frontière peut-être mince entre la bienveillance (vouloir faire le bien de l’autre) et la complaisance (s’accommoder aux goûts, aux sentiments d’autrui pour lui plaire) et il serait contre productif que ces deux termes se confondent. En effet, en voulant plaire à autrui, un individu perd sa personnalité pour se calquer sur les goûts de l’autre. En faisant cela, il perd également sa force créatrice, levier principal du bon fonctionnement d’une entreprise. 

Il est clair que la bienveillance est un puissant outil mis à disposition des entreprises et permettant d’améliorer la vie de ses salariés. Même si elle ne paraît pas s’adapter à tous les cas de figure, elle semble s’imposer dans les entreprises et devient même un “phénomène de mode”. Devant tant d’engouement pour ce concept, allant pourtant à l’encontre des valeurs capitalistes prônées aujourd’hui dans le monde du travail, peut-on vraiment croire que cette bienveillance est sincère ? Doit-on se méfier de la “fausse bienveillance” ?

Organisation et responsabilisation

La question de mon temps de travail a été évoquée tout au long de mon stage. Dès qu’un nouveau projet était annoncé, ma tutrice me demandait de communiquer le temps que j’estimais pour produire certains visuels. L’estimation devait donc se réaliser avec pour seul élément de comparaison les différents projets faits en classe. Cependant, un décalage existe toujours entre la théorie et la pratique : les horaires étant bien différentes, il était complexe de vraiment donner une fourchette de temps dans laquelle tout aurait été réalisable. Les missions s’accumulent et c’est en fonction de l’urgence de ces dernières que le planning s’établit ; mais c’est surtout ma tutrice qui me laissait la responsabilité de leur présenter une date de rendu pour les projets plus importants. Je m’imposais donc mes propres deadlines, que je devais respecter, et devait leur annoncer lorsque les missions s’enchaînaient trop rapidement. J’étais donc majoritairement responsable de mon rythme de travail (surtout si l’on prend en considération qu’il s’agissait là de télétravail uniquement).

Cette organisation était plus ou moins mise à mal par le fait que toute l’entreprise fonctionnait et produisait dans l’urgence : dès qu’une mission plus importante tombait, le reste était mis en pause pendant un temps indéterminé, ce qui était assez perturbant au début du stage : plusieurs visuels pouvaient donc être en cours, sans qu’aucun ne soit fini, et dans de rare cas, certains étaient abandonnés, jugés moins importants que les autres.  Le planning pouvait également être modifié par la communication mise en place en télétravail : tout se faisait par mail. Les visuels passaient de ma tutrice à la direction (pour les projets majeurs) et pouvaient donc prendre un certain temps avant d’être validés. Enfin, sans contact “direct”, des quiproquos pouvaient arriver entre temps entre les différents interlocuteurs. 

Même si j’étais plus ou moins responsable de mon planning, ce que je n’aurais jamais cru possible, en temps que simple stagiaire, j’étais également tenue responsable de mes productions : la question de la signature a émergée. Ma tutrice m’avait demandé de signer certains de mes visuels, surtout ceux qui avait comme destination les réseaux sociaux. Si bien évidemment l’ajout du logo de la marque sur les projets était une évidence pour moi, le fait de pouvoir y apposer une signature était un concept qui m’était assez étranger, car pour moi, il n’existait tout simplement pas de “droit d’auteur” en entreprise. C’est donc ajouté à tout cela une certaine responsabilité, car certains visuels étaient maintenant liés à mon nom.

Le fait de pouvoir non seulement “mettre en place” son planning (ou plutôt de s’organiser comme on le sens en fonction de ses capacités) mais également de pouvoir se réapproprier son travail, même au sein d’une entreprise, a eu clairement pour conséquence de me responsabiliser, de donner une valeur concrète et de pouvoir estimer mon temps de travail sur certains projets plus efficacement.

Remise en question stylistique au sein d’une entreprise

Pour mon stage de deux mois en illustration, les projets allaient de la création de visuels, à la vidéo, en passant par la création de logos. La diversité des missions m’a tout de suite interpellé, dans le sens où je me rendais compte de l’étendue des activités que pouvaient attendre un illustrateur. De manière général, mon esprit s’était refermé simplement aux illustrations « corporatives », sans prendre en compte à quel point le graphiste et l’illustrateur étaient liés sur le terrain. La frontière étant de plus en plus mince, je me suis mise à faire des recherches de typographies plus poussées pour les accorder aux visuels demandés, et à rechercher des références qui questionnaient plus en profondeur mes choix de compositions. Cependant, c’est après cela que j’ai heurté un mur : comment se renouveler au sein d’une entreprise ?

En effet, la question du flux créatif dans l’entreprenariat m’est tout de suite venu à l’esprit, puisque, malgré la diversité des médias, et des formats, je tournais toujours un peu en rond dans ce que je produisais. Il y avait une variété dans le contenu, mais plus dans le style, et petit à petit une sorte de culpabilité s’est installée : peut-on réellement produire du contenu différent du style qui a déjà été validé par l’entreprise ?

Même si je n’étais pas directement employée, le simple fait de vouloir se réinventer au sein de l’entreprenariat peut nous mettre face à des murs : c’est la question de l’identité de marque. En effet, le fait de devoir adopter les couleurs/ les formes d’une entreprise déjà sur le marché impose une restriction dans tout ce que nous produisons en temps que “créatifs”. Et c’est sûrement pour ça que sortir de sa zone de confort est si difficile dans ce genre de structure : lorsque nous trouvons un point d’accord, pourquoi vouloir chercher ailleurs et prendre le risque que cela ne passe tout simplement pas ? Nous nous retrouvons vite dans une situation où nous ne produisons rien de nouveau, ni pour l’entreprise, ni pour nous. 

Cependant, s’ajoute à cela la question de la collaboration : chaque retour était accompagné de précisions sur la demande initiale, ou dans certains cas, ce que recherchait la direction. Il n’était souvent question que d’une typographie qui n’était pas assez lisible ou assez douce à l’oeil du consommateur, mais cet esprit de collaboration aide à faire émerger de nouvelles idées, de nouvelles pistes de réflexion. Les retours permettent d’avoir un point de vue plus externe : que penserait un personne qui n’est pas forcément réceptive au graphisme de manière général ? Nous sommes donc présenté à un avis plus réaliste. Les typographies se font plus visibles pour les stories Instagram qui ne sont lisibles que pendant un lapse de temps réduit et le blanc tournant entre les informations se fait plus grand. Pendant ce temps là, les fins de journées étaient animées par des projets plus personnels. Les petites découvertes que nous pouvons faire par le biais de ces moments-là peuvent être réintégrés à notre travail, petit à petit.

Le stage nous met dans des conditions réelles et nous confronte à une clientèle qui s’est déjà habituée à une certaine image de marque. Nous pouvons toujours nous réinventer en questionnant cette base réfléchie au préalable par l’entreprise et c’est le fait de devoir conserver cette balance entre notre identité (enrichie par nos projets personnels)  et la leur (identité visuelle et la collaboration) qui fait que l’exercice devient vraiment enrichissant.