De l’audiovisuel à foison

POUR RÉSUMER

3 semaines de stage, 3 jours de montage, 7 journées de tournage, +10 rencontres professionnelles

Min&Ral, NewBalance x Footlocker, Circuit Paul Ricard, Pierre Garnier, Pain de sucre, D&P, OM x Puma, Mofak Bessis (Mofeezy)...

Ce stage se passe tellement bien qu’il dépasse mes espérances.

Quelques souvenirs – Avril/Mai 2025

Le monde de l’audiovisuel m’intéressant beaucoup mais étant très peu mis en avant dans notre formation, je souhaitais vraiment en apprendre davantage et me familiariser avec ce dernier durant ma période de stage. Pour cela, j’ai demandé à Meloman Production de me le faire découvrir et de me former. Ce dernier étant passionné par son métier, travaillant dur, dormant peu et mettant tout en oeuvre pour satisfaire ses clients (sans jamais oublié de produire dans le but d’en être fier). En effet, il fait preuve d’un professionnalisme, d’une rigueur et d’une qualité de travail remarquable.

Depuis le début de ce stage, je ne fais qu’apprendre de nouvelles choses chaque jour. Chaque projet, tournage, rencontre, m’apporte nombre d’informations techniques ou bien pratiques, telles que leurs rôles et leur importance, la manière dont ils procèdent… et me permet de voir le monde professionnel sous toutes ses facettes. Dès mes premiers jours de stage, j’ai mis les pieds dans le montage, ce dernier comprenant dérushage, montage (assemblage des rushes), ajout d’audio, étalonnage et retour clients. Par la suite j’ai pu assister à de nombreux tournages et ainsi comprendre ce qui précédait tout cela. En effet, avant toute création d’un produit il réalise un réel travail de réflexion sur la globalité du projet, allant de l’imagination passant par un travail sur l’univers qu’il souhaitera exploiter (souvent sous la forme de moodboard) en se concentrant sur la demande du client, à la création.

Moodboard D&P – Mai 2025

Meloman utilise principalement une caméra Sony FX3, des Polaroïd, un caméscope numérique, et quelques fois des drones pour user de plans qui vont du plus « basique » au plus atypique.
En somme, son travail ne se compose pas seulement de mise en application, comme je le supposais, mais d’une réelle réflexion qui va mener à un projet concret, fort en sens et parfait au rendu.

Avant de réaliser ce stage, je me demandais comment il était possible de réaliser autant de projets en si peu de temps et d’une qualité si impressionnante. Pour répondre à ce questionnement, j’ai discuté avec les différentes personnes que j’ai pu rencontrer sur les tournages, et user également de l’expertise de mon maître de stage. Suite à ces nombreux échanges avec des points de vue les uns tout aussi intéressants que les autres, j’ai compris qu’un vidéaste ou un professionnel de l’audiovisuel ne peut être seul lors de la création d’un projet. Les innombrables tâches, droits, mentions et personnes à prendre en compte en sont la cause. Ainsi, au fil des projets, un réseau se créer entre tous, ce dernier se trouvant être un point fort de Melo, à ce jour au centre de nombreuses boîtes de production (qui mettent tout en oeuvre pour satisfaire le client).

Quelques unes des boîtes de prod/collaborateurs que j’ai pu côtoyer

Par ailleurs, lors de la création d’un projet, un producteur audiovisuel se doit de pouvoir assurer toutes les phases, allant de la capture/du shoot, de plan, au montage et au rendu final du projet aux clients.
Pour cela il doit maîtriser un nombre de logiciels conséquent, comme DaVinci Resolve, Final Cut, Capture One et tout autre logiciel se reliant à l’image (ex: Suite Adobe). Il doit aussi savoir reconnaître un bon et un mauvais plan, maitriser toutes les règles de cadrage. Au delà du plan matériel ou bien utilitaire, il se doit d’être humainement correct, respectueux, ouvert d’esprit et adaptable.

Durant ces deux semaines, je me suis épanouie. De nouveaux métiers qui m’étaient encore peu familiers m’ont paru plus accessible, plus commun. De nouvelles rencontres m’ont ouvert davantage l’esprit. De nouvelles perceptions se sont offertes à moi. Ainsi, j’ai pu comprendre, apprendre, mettre en forme et créer de nombreux liens.

 Les plis du quotidien 

Je réalise mon stage chez Saïdath Ouabi, une designer pluridisciplinaire qui travaille entre design d’objet, de mode, architecture et graphisme. Depuis mon arrivée, je l’accompagne principalement sur la partie communication visuelle autour de son projet La Chaise Couture, une assise habillée de “robes” textiles, à la croisée du mobilier et de la mode. Je m’occupe de la notice d’utilisation, du packaging, ainsi que de la stratégie de communication (réseaux sociaux, newsletter…), tout en l’accompagnant ponctuellement sur des shootings photo ou des projets annexes, comme des visuels pour des marques de vêtements.

Croquis jupe en tulle

Ce qui m’a le plus étonnée au début du stage, c’est l’ambiance de travail : calme, chaleureuse et profondément humaine. On n’est que deux au bureau, et loin de l’image stressante que je me faisais d’un stage dans le design, tout est ici très fluide. Saïdath est attentive à mon bien-être, ne me met pas de pression inutile, respecte mes horaires et me rappelle souvent que je suis là pour apprendre. Elle me dit que l’entreprise ne repose pas sur moi, et que mes éventuelles erreurs feront partie de l’apprentissage. Cette bienveillance m’a vraiment surprise : je m’attendais à un univers tendu, exigeant, surtout en lien avec des marques de luxe. Et pourtant, malgré le sérieux des projets, la pression constante n’est pas présente.

Croquis de Saïdath et moi au bureau

Cette expérience m’a fait réfléchir à ma propre vision du travail. J’ai toujours eu tendance à associer efficacité à intensité, voire à épuisement. Ici, j’avance à mon rythme, dans un cadre structuré mais souple. Je me rends compte que l’on peut être engagée, productive, créative, sans sacrifier son équilibre. Cela m’a un peu troublée au début, car j’aime ce que je fais et j’ai naturellement envie de donner le maximum. Mais je commence à comprendre qu’il est aussi important d’apprendre à poser des limites, et à ne pas tout miser sur la performance.

Croquis de l’atelier où se déroule la partie textile

J’ai aussi été surprise par le dynamisme de son activité : je pensais qu’en freelance, le quotidien serait plus calme, moins chargé. Mais Saïdath multiplie les projets, les collaborations, les rencontres : réunions pour la Paris Design Week, rendez-vous avec Maison&Objet, l’Oréal, galléries parisiennes, échanges avec des stylistes ou des designers… Ça bouge beaucoup, et j’ai la chance de pouvoir assister à tout ça, souvent en coulisses. Cette diversité m’apprend énormément. Je touche à tout, je suis impliquée dans plusieurs tâches, et surtout, mes idées sont écoutées. Je ne me sens pas du tout cantonnée à un rôle d’exécutante : j’ai une réelle autonomie, tout en étant accompagnée. On fait des points réguliers, je propose, j’expérimente, et je me sens utile.

Stock des chaises (no spoil)

Ce stage me pousse à reconsidérer certains clichés sur le monde du travail, notamment dans les domaines créatifs. Il me montre qu’il est possible d’évoluer dans un cadre exigeant sans se sentir oppressée, de collaborer avec rigueur sans rigidité, et surtout, de construire une relation de confiance où chacun apprend de l’autre. J’en ressors motivée, inspirée, et un peu plus confiante dans ma capacité à trouver ma place dans ce milieu.

WeLoveJungle

J’entame ma 4ème semaine chez WeLoveGreen… et ma rencontre avec l’événementiel fût soudaine (pour ne pas dire brutale). Alors, ça peut paraître négatif quand je dis ça, mais en réalité ça me change entièrement de l’environnement que j’aurai pu expérimenter dans un studio graphique quelconque.

Dès le premier jour, on me présente l’équipe, le lieu etc…. Et PUIS, D’UN COUP D’UN SEUL, je vois la quantité de fichiers, d’échanges, de deadlines qui se trament derrière un aussi gros festival qu’est WeLoveGreen. Et c’est à ce moment précis que je me suis vue perdue au beau milieu d’une jungle professionnelle où tout semble s’enchaîner.

Je suis contente d’avoir un stage dans l’événementiel mais aussi d’en avoir déjà vécu un dans un studio graphique : cela peut me permettre de voir vraiment les différences entre les deux. Avant de rentrer chez WeLoveGreen, j’avais une image très floue de ce qu’était réellement l’événementiel et toute l’organisation et les échanges nécessaires. Un open space, 6 pièces de travail, beaucoup d’ordinateurs pour une bonne trentaine de personnes (sans compter la soixantaine d’autres personnes que je n’ai jamais rencontré). Et ceci pour 5 pôles principaux : Communication / Développement durable / Partenariat / Administration / Direction. Je fais partie du pôle communication où l’on est 4 graphistes, 2 responsables communication, 3 gérants des réseaux sociaux/newsletters. 

Donc autant dire que 3h après être arrivée pour la première fois, tout ça m’arrive en pleine tête… Je me suis directement dit que le temps d’adaptation allait être long. 

Illustration : comment j’ai vécu la première semaine

Les premières phrases que l’on m’a dit n’ont pas arrangé l’appréhension que j’avais : « Va falloir s’accrocher ! » « Ça va enchaîner ! »… En effet, pour ce qui est de notre pôle communication, on doit produire en quantité : une multitude d’affiches sous divers formats, newsletters, spot tv, réseaux sociaux, appli, et j’en passe. Je me dis que la quantité de supports à produire est censée pour l’ampleur du festival ainsi que pour sa promotion. Mais c’est surtout les deadlines qui m’ont interpellée :

BD : Un des premiers briefs du pôle communication…

En fait, j’ai vraiment cette impression que moi et les autres graphistes avons des missions très souvent dans l’urgence. La première fois que je m’en suis directement rendue compte, c’est le jour où je devais produire une vidéo J-50 pour Instagram. Laura me donne le brief à environ 14h :

Laura : « – Du coup c’est tout bon pour toi ? Hésite pas à me poser des questions si besoin.

Moi : – Oui ça marche, merci !

Laura – Par contre, c’est à rendre pour ce soir.

Moi : – ….. ah d’accord je savais pas. »

Puisque je m’occupe quasiment que de la partie réseaux sociaux (divers types de posts, réels Instagram, tiktok), il faut toujours être à jour sur ce que l’on va poster le jour même ou dans les jours à venir. Mais je me demande si cette notion « d’urgence » est récurrente dans le monde de l’événementiel ou si parfois ça n’atteint pas les limites d’une mauvaise communication ou d’anticipation. 

selection de quelques posts, réels sur lesquels j’ai été missionnée

Je pense que je pourrais répondre à cette question et avoir un meilleur recul d’ici les prochaines semaines à venir : quand le rythme s’accélérera vraiment.

Perdue dans le langage de la télévision

Avant ce stage, le monde de la télévision c’était flou, voire inexistant dans mon imaginaire. Un truc de vieux. Je ne connaissais ni les codes, ni le vocabulaire, encore moins les contraintes. Je consommais de l’image, mais sans jamais penser à ce qui l’encadrait. L’habillage, l’autopromo, les jingles, les idents, les BA, les bugs antenne… C’était juste du bruit de fond.

Et puis j’ai débarqué chez Motion Fan Club : une agence de design graphique basé à Paris, spécialisé dans l’identité visuelle en mouvement. L’agence conçoit des habillages pour des chaînes de télé, mais aussi pour des expos, des plateformes, des campagnes digitales ou culturelles. C’est un univers ultra-codé, mais très vivant. Ici, le design est dynamique, précis, souvent millimétré et c’est fascinant.

Les conditions de travail y sont particulièrement agréables : bienveillance, exigence et autonomie cohabitent sans conflit.

Moi je suis tombée direct dans le feu de l’action. On me briefe à la volée, je propose, j’essaie, je teste, je recommence. L’ambiance est fluide, et malgré mes appréhensions, mes idées sont prises au sérieux dès le départ. Je travail en collaboration avec le Directeur artistique sur des fichiers partagés en réseau : on est dans un échange constant. Et ce qui me plaît, c’est la création en continu avec la conception de systèmes graphiques et l’élaboration de plusieurs pistes.

On produit beaucoup, vite, parfois plusieurs projets en même temps, pour des clients très différents : Depuis le début de ce stage j’ai été amené a travailler sur une chaîne de sport d’Outre-mer qui veut se détacher de l’identité France TV, ainsi que sur une toute nouvelle chaîne d’info locale (Novo19) dérivé de ouest France qui s’installe suite au départ du groupe C8.

J’ai dû apprendre un nouveau vocabulaire, « le langage télé ». Une grammaire complète où chaque visuel est pensé comme un kit ultra structuré :

→ L’habillage antenne, c’est un logo animé, un claim, un univers sonore.

→ L’identité visuelle JT, ce sont des bugs, des bandeaux, des mentions éditables, du scroll, une horloge…

→ L’autopromo, ce sont les packshots, les bumpers, les annonces “ce soir” / “demain” déclinées pour toutes les plateformes.

Condensé des 3 formes de bases de l’habillage TV

→ Et chaque élément doit être décliné pour le digital, le replay, les réseaux sociaux.

Au début, tout ce vocabulaire me paraissait abstrait, un vrai charabia. Maintenant je commence à comprendre les attentes, les différences entre un teaser événementiel et un kit d’autopromotion. Je sais lire plus ou moins lire un brief, décoder les besoins. Et surtout, je découvre à quel point le client peut avoir des exigences visuelles précises : il veut du “cinéma”, du “blockbuster américain”, alors que l’agence essaie de maintenir une exigence graphique. Il faut donc apprendre à s’adapter, à négocier, à traduire une intention floue en image claire. À chaque fois, l’enjeu est de rester créatif sans perdre l’efficacité du message.

Un autre choc : les budgets. Parfois 200k€ pour un habillage d’antenne. Et l’usage de l’IA générative comme Midjourney pour certains visuelles animés peut être utilisés afin de réduire les coûts de tournages ou d’éviter des droits d’images ( exemple, images d’enfants )

Je ne peux malheureusement pas montrer de visuels pour l’instant, car tant que les projets ne sont pas finalisés et diffusés, ils restent confidentiels.

Pour conclure, je découvre un champ entier du design que je ne connaissais pas, avec ses règles et ses enjeux. C’est intense, rapide, plein de jargon, mais aussi hyper stimulant. Je vois mieux comment une chaîne de télé construit une identité, et ça me donne envie d’aller plus loin dans cette direction. Finalement, même si je viens d’un autre monde, je commence à parler leur langue.

Entre artiste et employé

Après quelques semaines d’un enchaînement de divers boulots proposés non-stop par différentes entreprises, allant d’autres freelances à des multinationales, je commence à me questionner sur l’aspect plus artistique du travail.

Qu’en est-il réellement ? Est-ce qu’un freelance peut se permettre de jongler entre ses jobs pour les entreprises qui lui permettent de vivre et des projets artistiques qui ne lui rapportent rien ?

J’ai eu ma réponse assez vite. Pile au moment de mes questionnements, les appels de brief étaient beaucoup moins intenses, les briefs se faisaient plus rares et nos journées commençaient à se libérer.

En fait, Matthieu l’avait prévu. Chaque année, cette période de fin juin lui permet de travailler sur des projets artistiques. Passionné des astres et des planètes, il traduit sa vision d’un univers inconnu sur de multiples logiciels jusqu’à une réalisation finale créée par Draw Machine (un bras robotisé qui dessine des images vectorielles).

Je me rends compte alors que Matthieu (en plus des rendus à finir pour la semaine) passait ses week-ends à expérimenter, en prévision de cette période artistique, des effets qui pourraient être ajoutés sur ses tableaux. De la peinture à la 3D, Matthieu a tout envisagé pendant que moi, j’étais crevé de tout le boulot produit de la semaine.
J’ai compris qu’en tant que freelance, si tu veux créer quelque chose qui te plaît, il faut s’y donner à fond. En travaillant non-stop sur les espaces de temps libre au lieu de s’occuper à ne rien faire en regardant des vidéos ou autre, Matthieu a pu définir ce qu’il voulait créer pour ses prochains tests artistiques et comment m’y faire participer.

Nous avons donc passé les dernières semaines à expérimenter, des tags sur des murs illégaux au milieu de Clichy, de la recherche de plugins qui pourraient permettre une traduction des ombres de projets 3D en formes vectorielles, à la création d’espaces pour des meubles de son bureau.
Finalement, le plus important dans tout ce travail était l’aide que je lui apportais sur le choix des plugins et comment utiliser la Draw Machine. Il m’a fait apprendre l’utilisation de celle-ci grâce à de multiples tests 3D et vectoriels, et aussi avec des visioconférences entre ses amis qui utilisent la même machine.

Bref, les dernières semaines étaient beaucoup plus cool car libres. On ne savait pas trop, tous les deux, où on allait chaque jour. On avait tellement de possibilités grâce au travail de préparation de Matthieu les week-ends auparavant qu’on avait un choix illimité de projets artistiques à choisir et de questions à répondre.
La fin du stage et la dernière semaine étaient l’apogée de cette recherche créative autour de la Draw Machine, où on laisse juste la machine travailler à partir de tout ce qu’on a produit les deux dernières semaines, et nous, on regarde tout ce travail prendre vie devant nous. Matthieu a été un super chef de projet, m’a fait découvrir plein de choses, était toujours prêt à m’aider pour la création et des astuces sur les différents logiciels. 

Ce que j’ai appris à travers ce stage, c’est l’importance de la préparation du travail en tant que graphiste, l’importance aussi des contacts, étant donné que Matthieu ne fonctionne que grâce à des contacts (il n’a pas de portfolio, par exemple). Et aussi, le plus important est de faire ce qui nous fait plaisir. Il ne se force jamais dans un projet et quand le projet ne va pas, il le fait savoir aux clients, ce qui permet de créer une relation plus forte avec eux.

Complice du mensonge

Une grande partie de la post-production réside dans l’art de tromper son public sans même que ce dernier ne puisse s’en rendre compte. L’idée est de parfaire l’illusion à un point tel qu’elle en devient la réalité, de transformer l’image pour la dénuer de toutes ses imperfections d’origine. Cependant cette image a su rapidement devenir la norme, et le mensonge a finalement réussi à prendre le pas sur le réel.
Ainsi ces visuels qui nous entourent à chaque instant de par les réseaux, les publicités ou encore la télévision et le cinéma, nous plongent dans une idée parfaite des choses, et par conséquent changent notre vision du monde et des gens. 

L’illusion face à la réalité d’une personne


Retouches et réalités se confondent alors et révèlent ainsi plusieurs questionnements au sein de la post-production.

Quel est le rôle de ceux qui sont dans les coulisses de cette tromperie ? Comment travailler dans un milieu où l’on modifie constamment la réalité ?

Cette position pose plusieurs questionnements au niveau de l’éthique et inquiète au sujet des plus naïfs. Durant ce stage j’ai su passer de victime de la post-production à son complice, tout en ayant pu faire évoluer mes réflexions à son sujet.

Aujourd’hui plus que jamais, nous vivons dans un environnement pollué par les médias et où, l’image nécessite la plupart du temps d’être parfaite pour vendre. Cependant cette perfection est tellement bien maîtrisée qu’elle paraît trop souvent naturelle, et c’est ici que le problème se pose : nous véhiculons une fausse réalité, et chaque imperfection devient alors sujet d’insécurité. Ce problème touche surtout les plus jeunes et les plus naïfs, mais il reste tout de même questionnable peu importe le public concerné. En effet, j’ai moi-même été victime de ces visuels, qui m’ont amenée à plusieurs reprises à douter de moi, de me poser des questions au sujet de mon image en comparaison de ces images parfaites. Et à la différence des images fixes, où l’on se doute assez facilement des retouches, l’envisager sur des vidéos est tout de suite plus compliqué. En effet, si l’on compte les 25 images par secondes, cela paraît trop fastidieux pour être retouché à la perfection, et nous mettons de côté la possibilité de retouches importantes concernant les vidéos. Cependant, j’ai su me glisser dans les coulisses de ce mensonge et en comprendre davantage les rouages : et ça fait PEUR. 

L’aveuglement de l’individu qui baigne dans un environnement médiatique trop retouché

En effet, le matériel actuel est si évolué que presque toutes les retouches sont envisageables, et ça, les clients sont bien au courant. J’ai vu passer un assez grand nombre de vidéos destinées à de grandes marques de luxe (dont je ne citerai pas le nom), pour dire que l’éthique ne fait pas toujours partie de leur vocabulaire. Changement de couleur de peau, de visage, de corps….c’est à se demander pourquoi l’égérie a été choisie si c’est au final pour la recomposer à ce point. Et derrière toutes ces modifications se cachent des techniciens de l’image, conscients de leur tromperie, ils n’ont pas le choix, l’amour de l’image l’emporte parfois sur l’éthique tant le challenge est séduisant. De plus, les marques tiennent à leur standing et quitte à braver certaines règles : tout doit être parfait. Cependant, tout ça représente un poids pour l’artiste derrière ces retouches, qu’il doit parfois trier, ajuster, il se doit aussi de proposer des alternatives pour éviter d’être en contradiction avec ses valeurs morales. De plus, il peut aussi rencontrer des difficultés à changer totalement le physique d’un mannequin, victime de son imperfection et ne pouvant rien redire sur son alter ego virtuel.

Le physique imparfait face à son alter ego virtuel, né de la post production

Ainsi, le technicien, a toutes les clés en main pour duper, il a en sa possession une arme puissante qui crée des réalités, au dépit des plusieurs conséquences sociales et éthiques qu’il engendre. Ainsi ce métier est aussi complexe au niveau technique qu’au niveau éthique, et bien qu’un sentiment de culpabilité peut souvent peser sur la conscience, le travail réalisé continue de faire rêver, et c’est bien connu : le rêve, c’est ce qui se vend le mieux.

Un autre regard sur le statut de Freelance

Chez World+, il n’y a qu’un seul employé : la comptable.  Tous les autres statuts sont variés, incluant stagiaires, alternants et freelances, qui travaillent avec des rythmes différents. Les freelances sont présents entre 2 à 3 jours dans l’entreprise. En fonction des besoins des projets, lorsque leurs compétences spécifiques ne sont pas requises, ils deviennent parfois assistants pour d’autres métiers . 

C’est cette polyvalence enrichissante que je venais chercher chez World+. 

Mais le manque de communication et d’organisation de la part des marques et des freelances qui ne sont pas tout le temps présents engendre souvent du stress et des difficultés à apprécier pleinement le processus créatif, ce qui affecte les employés. De prime à bord, cela semblait donc une mauvaise idée d’être en freelance pour un tel métier car leur absence cause des disfonctionnements.
En tant que graphiste chez World+, j’ai souvent vu mon tuteur Maël confronté à ces défis. J’ai moi-même vécu ces difficultés lors d’un projet pour SOLID. À moins d’une semaine de l’événement, j’ai été chargé de créer les visuels sans consignes claires ni dossiers de brief. 

J’ai été très surprise par le manque d’informations pour des éléments si importants du décor. A la fois de la part de World+, et de la marque SOLID. Personne autour de moi n’était étonné par ce manque d’informations, et personne ne pouvait répondre à mes questions.

Cette expérience m’a donc interroger sur la place du graphiste dans le set design, et par la suite sur le statut de graphiste freelance.

J’ai discuté avec mon tuteur sur ce sujet, et en combinant mon expérience lors du défilé SOLID avec la sienne, j’ai compris comment de nombreux détails s’entremêlent pour expliquer son statut de graphiste freelance, malgré tous les problèmes que ça peut engendrer. 

Le graphisme est rare dans ce domaine pour plusieurs raisons. 

Le graphiste ne peut donc pas être employé à faire cela tous les jours de la semaine quand la demande est si petite. Il lui faut donc une autre activité pour avoir une autre source de revenu. 

Maël joue un rôle crucial chez World+, mais il reste freelance la majorité de la semaine.

% de travail W+ pour mon tuteur
les autres jours ne sont pas systématiques, cela dépend des projets

Les marques, même les plus prestigieuses comme Louis Vuitton ou Dior, réduisent souvent les coûts de production de leurs publicités et événements, imposant des délais très courts. Ces contraintes affectent le graphiste, qui doit souvent travailler dans l’urgence.

Le graphisme lié au décor est souvent discuté une semaine avant l’événement, voire quelques jours avant. Dans ce délai serré, Maël doit mettre en pause tous ces autres projets pour produire rapidement les contenus graphiques.

Cela peut avoir lieu 3 à 4 fois dans les mois les plus chargés, souvent sans facturation supplémentaire si cela tombe sur ses jours de travail chez World+. En revanche, s’il travaille en dehors de ces jours, ses prestations sont facturées comme celles d’un consultant freelance, avec des tarifs ajustés en fonction du budget du projet. Il m’a confié qu’il ajuste les prix de ses prestations les plus importantes pour compenser la valeur réduite de son travail sur des projets au budget très serré, où il n’est parfois pas payé.

On entend souvent que les freelances ont du mal à obtenir des clients réguliers et doivent souvent démarcher ou accepter des commandes peu attrayantes.

Il bénéficie d’un avantage certain car il a un pied dans une entreprise qui lui apporte des clients. Il peut ainsi gérer son emploi du temps et ses autres contrats sans le stress de devoir générer un salaire minimum, car il obtient un salaire stable grâce à son réseau au sein de World+.

Il travaille certes pour des marques de luxe très prisées et difficiles à atteindre, mais elles ne sont pas aussi généreuses qu’on pourrait le croire. Il collabore avec ces marques sans être directement reconnu, mais son réseau et le bouche-à-oreille lui apportent des opportunités. Et il semble satisfait de son mode de vie à seulement 24 ans.

La place du graphiste dans le set design est imprévisible et peu encadrée, mais certains réussissent à se faire une place et à gagner leur vie par ce biais. 

Ce projet pour SOLID m’a fait réaliser que les clients externes ne mesurent pas toujours le travail nécessaire et la diversité des savoir-faire mobilisés. Beaucoup d’entre eux ne soupçonnent pas que l’entreprise est un collectif de profils travaillant en parallèle pour l’image de World+. 

Il m’a également permis de découvrir les particularités du travail en freelance sur le terrain, ce qui est rassurant car cela ouvre de nombreuses possibilités, souvent plus positives que ce que l’on entend habituellement. Ce mode de vie semble perenne car tous les corps de métiers chez World+ fonctionnent ainsi, et toutes les personnes que j’ai pu rencontré sur des shootings également.

Brief sur brief sur brief

Je me suis toujours questionnée sur comment fonctionnait un graphiste freelance. C’est une direction qui m’attire, déjà par la diversité de boulots que peut proposer ce métier mais aussi étant donné que c’est une situation qui est bientôt proche.

Rapidement, j’ai eu ma réponse, c’est les CONTACTS !

Matthieu ne s’arrête pas, il bosse toute la journée sur plein de sujets divers, dans un emploi du temps géré et serré, le tout avec des rendus chronométrés. Et le PIRE, c’est que même quand il ne bosse pas, il bosse. Chaque week-end, il est en voyage à des conférences, conventions, meetings et autres, sur Paris, Marseille, Lyon, où il rencontre graphistes, clients, grosses boîtes et où il distribue ses cartes de visite.

Tout ça mélangé à ces quelques années de boulot qu’il a fait dans la com avant de devenir freelance, il a des centaines de contacts différents, et il tient à rester proche de ses clients, on a l’impression qu’ils sont amis, il rigole avec eux.

Donc, au final, les clients de Matthieu retiennent son nom et le partagent à d’autres futurs clients. C’est cool de voir comment le bouche à oreille marche dans ce monde, comment on passe d’un pote à Matthieu qui a besoin d’un logo, à une petite boîte, à une énorme entreprise type BNP Paribas ou Bouygues.

Le problème (qui n’en est pas un) c’est que maintenant, en une semaine, on enchaîne les briefs ! Tu viens juste de terminer un projet que, d’un coup, deux autres viennent d’être reçus. À un point que je me demande comment faisait Matthieu avant sans mon aide.

Cette diversité de projets vient jouer aussi dans mon sens, on se les partage, à un point que sur certains projets j’ai presque bossé entièrement seul dessus (toujours sous l’œil de Matthieu qui vient me conseiller sur les rendus finaux et les petites modifs à faire).

Tout ce travail en solo me permet de placer toutes mes connaissances dans des projets réels et me permet de me rendre compte surtout de la diversité des clients. Je me rends compte qu’il n’y a rien vraiment de compliqué, que j’ai déjà toutes les cartes en main, qu’il me manque juste le petit truc, l’œil qui me permet de voir les petits détails que Matthieu, lui, voit en un seul visionnage.

Actuellement, le plus énervant, c’est de ne rien voir de concret en dehors de mon écran. La grande majorité des projets sur lesquels on bosse ne sont pas encore utilisés par les clients ou postés sur les réseaux, et les différentes identités visuelles sur lesquelles on travaille sont toujours soit au début, soit interminables avec des clients qui ne savent pas ce qu’ils veulent, donc on n’a encore rien imprimé, ni cartes de visite, ni affiches.

Les dernières semaines ont été chargées en boulot, et donc sont passées vite, mais en tout cas, cette insertion dans la création réelle avec tous les enjeux entrepris par celle-ci m’a permis de me rassurer. Même quand je fais une erreur en interprétant mal la vision du client, je ne perds rien et le client non plus, lui permettant de préciser sa vision et moi de repartir sur les anciennes bases du précédent boulot pour mieux répondre à la demande.

Rarement parfait du premier coup

Depuis le début de mon stage, j’ai été confronté à divers retours clients, positifs, négatifs, ou aucun. Et à différents types de clients (artiste, compagnie, association ou membre de l’équipe du théâtre).

J’ai l’habitude des retours des professeurs, mais là, je fais face à de vrais clients. Tout devient plus concret, surtout quand il s’agit de la production d’un gros spectacle ou de satisfaire un artiste rigoureux.

L’un des premiers retours clients marquants ne fut pas le plus agréable. Un soir, on nous informe en urgence que la metteuse en scène, mécontente, menace d’annuler sa dernière représentation, prévue dans une salle comble, car une erreur dans la distribution sur le site de la billetterie s’était glissée. La réaction fut immédiate : l’erreur fut rectifiée, et nous avons pris des précautions pour nos supports de communication sur ce spectacle. Cette expérience m’a appris à être adaptable, flexible, réactif et à garder mon sang-froid face à des clients parfois énervés.

D’autres retours, moins tendus, ont concerné les programmes de salle que j’ai réalisés et envoyés aux productions des compagnies. Les délais de réponse variaient : certains réactifs dans la journée, d’autres prenant plusieurs jours, voire ne répondant pas du tout. Heureusement, la plupart validaient le programme après quelques modifications rapides (distribution, biographie…). En cas d’absence de réponse, nous publions le programme après relecture interne. Les retours échelonnés compliquaient parfois le travail, obligeant de multiples reprises et exports du document.

Les retours sur la communication sur les réseaux sociaux étaient divers : l’administration d’un théâtre partenaire appréciait notre travail, tandis que quelques rares artistes trouvaient notre communication insuffisante à leur égard. Parfois, les compagnies demandaient de modifier des publications déjà diffusées, notamment pour le son qui ne collait pas à leur spectacle.

J’ai également reçu des retours pour la conception et la mise en page d’un cahier pédagogique pour l’exposition actuelle, venant de diverses personnes et services (production, communication, secrétariat général, relations publiques). Les retours, bien que longs et répétitifs, m’ont permis d’améliorer le cahier, et je suis satisfait du résultat final. Malheureusement, tous ces retours on fait trainé sur plusieurs semaines la version finale.

AAAAAAAAAHHHH … la brochure !

En plein dedans, c’est le boom. La brochure est l’un des supports de communication imprimés les plus importants, surtout avec la présentation de la saison qui approche. Elle met l’équipe sous tension, d’autant plus que les délais pour le BAT ne sont pas respectés et que les premiers jais de brochure laissent à désirer.

Pour obtenir une brochure correcte :

· sélectionner les images et le traitement graphique, rédiger les textes des spectacles et les envoyer à la graphiste (la graphiste crée les 1ères versions de brochure)

· envoyer les doubles pages de la maquette à chaque compagnie et attendre leurs retours.

Les échanges sont parfois moralisateurs. Certains sont contents, d’autres mécontents du texte ou de l’absence de mention de la production. Cela nécessite de nombreux échanges pour expliquer nos choix.

· renvoyer les modifications à la graphiste

puis :

boucle de la relecture brochure, pendant plusieurs jours et semaines jusqu’au BAT

Certains retours (distribution, droits d’images, horaires…) entraînent des conséquences en chaîne, affectant non seulement la brochure mais aussi le site internet et d’autres documents annexes, nécessitant une réaction rapide pour adapter les contenus. Les retours clients, bien que parfois difficiles à gérer, sont essentiels pour actualiser les données des spectacles et améliorer les supports de communication. Apprendre à laisser passer certains échanges négatives sans surenchérir est crucial pour maintenir de bons contacts et gérer les pressions inhérentes à ce milieu.

Heureusement, que de manière globale les retours sont plutôt positif !

Jauge des retours clients sur les modifications de divers supports de communication

Apprendre à faire

Je ne sais pas du faire du montage. Je n’en ai jamais fait. Et ça ne m’attirait pas spécialement. Mais depuis quelques semaines, j’effectue un stage où l’on me demande de faire du montage vidéo et du motion design pour tâche principale.  Je le savais quand j’ai postulé, et Bolero a eu confiance en moi dès l’entretien pour me confier ces tâches techniques.

Le stage se déroule bien et je suis finalement reconnaissant d’avoir cette opportunité d’apprentissage. Chaque jour, j’acquiers de nouvelles compétences techniques et découvre des aspects fascinants à ce que je ne pensais ne pas apprécier faire, avant le stage.

moi face au mur de choses à apprendre

Le montage vidéo me permet de comprendre l’importance du rythme, de la narration visuelle et de l’attention aux détails. Quant au motion design, il m’ouvre les yeux sur les grandes possibilités de l’animation et du mouvement des éléments graphiques. Et tout cela parce que je ne me suis pas opposé à l’idée de le faire ! Avant même de commencer, je savais que réaliser des vidéos représenterait 80 % de mon stage, et au lieu de me lamenter parce que je n’avais pas d’autres opportunités de stage, j’ai décidé de tirer profit de cette opportunité, d’apprendre et de relever le défi. 

moi escaladant le mur de choses à apprendre

Ce qui m’a le plus interroger à la suite de ces réflexions, c’est surtout…

Après avoir fait de gros projets avec les différents membres de l’équipe, évidemment que oui ! Mais encore une fois, je me pose la question : Finalement… est-ce que j’aime ça ?

Eh bien en cette moitié de stage, j’en ai bien l’impression. J’ai aujourd’hui envie de faire des projets personnels où il faut passer par la case montage vidéo ou motion. Je pense qu’avant mon stage, ce n’était pas que je « n’aimais pas faire du montage ou du motion design », mais plutôt que je n’avais pas envie de le faire pour moi-même. Je ne m’y consacrais pas pendant mon temps libre, et cette partie du graphisme ne me procurait pas d’intérêt particulier.

Aujourd’hui je me pose alors des réflexions plus poussées quant aux origines de pourquoi je n’aimais pas particulièrement le montage ou le motion design. Est-ce de la peur ? Est-ce le dégoût de devoir faire mes devoirs, perçu comme un exercice scolaire dans lequel je ne cherche pas à prendre du plaisir à ce que je fais ? Les réponses je les aurai certainement à la rentrée , voir même que j’aurais un début de réponse d’ici quelques semaines à la fin de mon stage. 

Apprendre à aimer une branche du design bien précise ce pas simplement se dire…

En ce moment, je me pose des questions sur ce que je veux exprimer, ce que je veux dire. Mais avant tout, pour trouver ce que je veux dire, j’ai l’impression que je dois trouver comment je peux m’exprimer. Apprendre à faire les choses, et ce stage  m’obligeant à le faire sur la vidéo et le motion, ça me permet de répondre progressivement à mes envies et à trouver un moyen d’expression. J’ai hâte de voir comment cette période va continuer de me faire progresser et j’ai hâte de découvrir de nouvelles réponses dans mon apprentissage.