La bienveillance peut-elle rimer avec exigence ? 

Lorsque j’ai commencé mon stage chez Saïdath, j’étais prête à m’adapter à un univers que j’imaginais intense, voire stressant. Je m’étais préparée à affronter la pression des délais, la rigueur d’un univers créatif en lien avec des marques de luxe, et une certaine distance professionnelle. Ce à quoi je ne m’attendais pas, c’est à trouver un cadre de travail profondément bienveillant et pourtant, aussi exigeant.

L’étonnement est venu de là : comment un tel équilibre est-il possible ? Comment concilier attention portée à l’humain et niveau d’exigence élevé ?

Dès les premiers jours, j’ai été frappée par la manière dont Saïdath encadre le travail : de façon précise, impliquée, mais toujours avec douceur. Elle prend le temps d’expliquer, reformule si nécessaire, valorise les idées, et surtout : ne dramatise pas l’erreur. Le mot « apprendre » revient souvent dans ses phrases, au même titre que « expérimenter ».

Mon cerveau qui tabasse un préjugé

Pourtant, derrière cette souplesse apparente, le rythme de travail est soutenu. Les projets s’enchaînent, les objectifs sont clairs, les délais respectés, les productions rigoureuses, il y a tellement de choses dont j’aimerai vous parler ici mais malheureusement ce n’est pas encore sorti donc il faudra attendre un peu. Ce que je peux dire en revanche c’est que je travaille sur la Paris Design Week et je m’occupe avec Saïdath de toute la partie recherche, DA et c’est à la fois dingue et en même temps je ressens une certaine exigence qui est attendu dans mon travail. 

« J’ai envie de faire quelque chose de grand » 

Saïdath

En temps normal je pars souvent dans tous les sens niveau projet j’ai beaucoup d’idée mais pas les moyens pour les réaliser. Sauf que là j’ai le problème inverse je peux proposer ce que je veux mais je me limite dans mes propositions par peur de manquer de moyen, alors que c’est possible ! C’est un peu marrant. 

Moi totalement pas à ma place chez Maison & Objet

Cela m’a obligée à reconsidérer l’image que j’avais d’un environnement professionnel « sérieux ». Je croyais que l’exigence devait forcément se manifester par la dureté, la distance, voire une certaine forme de pression comme je peux le voir quand elle est en réunion chez l’Oréal. Sauf que ici, l’exigence est présente, mais elle est intégrée à une démarche pédagogique et collaborative. Elle n’écrase pas, elle élève.

Et cela change beaucoup de choses. Parce que je me sens en confiance, je m’autorise à proposer, à tester, à poser des questions. Je n’ai pas peur de ne pas savoir. 

Schéma de ce qu’il se passe pendant un projet

Et paradoxalement, c’est peut-être dans ce cadre détendu que je me sens le plus investie. La bienveillance ne dilue pas la rigueur : elle crée les conditions pour que je sois plus autonome, plus concentrée, plus créative. Elle m’encourage à prendre des initiatives, mais m’offre aussi le droit à l’imperfection.

Cette approche m’interroge sur ma propre vision du travail : est-ce que j’ai intégré malgré moi l’idée que performance et souffrance doivent aller de pair ? Que pour être crédible, il faut forcément se surpasser au risque de se brûler ? Ce stage me montre qu’il existe d’autres modèles, plus équilibrés, plus respectueux. Et qu’ils ne sont pas moins efficaces.

En somme, mon étonnement ne vient pas tant de la bienveillance en elle-même, mais de sa coexistence avec une exigence réelle. Le monde du travail peut être un espace d’exigence sans être un lieu de tension. Et c’est peut-être cette nuance-là que je retiendrai le plus.

 Les plis du quotidien 

Je réalise mon stage chez Saïdath Ouabi, une designer pluridisciplinaire qui travaille entre design d’objet, de mode, architecture et graphisme. Depuis mon arrivée, je l’accompagne principalement sur la partie communication visuelle autour de son projet La Chaise Couture, une assise habillée de “robes” textiles, à la croisée du mobilier et de la mode. Je m’occupe de la notice d’utilisation, du packaging, ainsi que de la stratégie de communication (réseaux sociaux, newsletter…), tout en l’accompagnant ponctuellement sur des shootings photo ou des projets annexes, comme des visuels pour des marques de vêtements.

Croquis jupe en tulle

Ce qui m’a le plus étonnée au début du stage, c’est l’ambiance de travail : calme, chaleureuse et profondément humaine. On n’est que deux au bureau, et loin de l’image stressante que je me faisais d’un stage dans le design, tout est ici très fluide. Saïdath est attentive à mon bien-être, ne me met pas de pression inutile, respecte mes horaires et me rappelle souvent que je suis là pour apprendre. Elle me dit que l’entreprise ne repose pas sur moi, et que mes éventuelles erreurs feront partie de l’apprentissage. Cette bienveillance m’a vraiment surprise : je m’attendais à un univers tendu, exigeant, surtout en lien avec des marques de luxe. Et pourtant, malgré le sérieux des projets, la pression constante n’est pas présente.

Croquis de Saïdath et moi au bureau

Cette expérience m’a fait réfléchir à ma propre vision du travail. J’ai toujours eu tendance à associer efficacité à intensité, voire à épuisement. Ici, j’avance à mon rythme, dans un cadre structuré mais souple. Je me rends compte que l’on peut être engagée, productive, créative, sans sacrifier son équilibre. Cela m’a un peu troublée au début, car j’aime ce que je fais et j’ai naturellement envie de donner le maximum. Mais je commence à comprendre qu’il est aussi important d’apprendre à poser des limites, et à ne pas tout miser sur la performance.

Croquis de l’atelier où se déroule la partie textile

J’ai aussi été surprise par le dynamisme de son activité : je pensais qu’en freelance, le quotidien serait plus calme, moins chargé. Mais Saïdath multiplie les projets, les collaborations, les rencontres : réunions pour la Paris Design Week, rendez-vous avec Maison&Objet, l’Oréal, galléries parisiennes, échanges avec des stylistes ou des designers… Ça bouge beaucoup, et j’ai la chance de pouvoir assister à tout ça, souvent en coulisses. Cette diversité m’apprend énormément. Je touche à tout, je suis impliquée dans plusieurs tâches, et surtout, mes idées sont écoutées. Je ne me sens pas du tout cantonnée à un rôle d’exécutante : j’ai une réelle autonomie, tout en étant accompagnée. On fait des points réguliers, je propose, j’expérimente, et je me sens utile.

Stock des chaises (no spoil)

Ce stage me pousse à reconsidérer certains clichés sur le monde du travail, notamment dans les domaines créatifs. Il me montre qu’il est possible d’évoluer dans un cadre exigeant sans se sentir oppressée, de collaborer avec rigueur sans rigidité, et surtout, de construire une relation de confiance où chacun apprend de l’autre. J’en ressors motivée, inspirée, et un peu plus confiante dans ma capacité à trouver ma place dans ce milieu.