Entre artiste et employé

Après quelques semaines d’un enchaînement de divers boulots proposés non-stop par différentes entreprises, allant d’autres freelances à des multinationales, je commence à me questionner sur l’aspect plus artistique du travail.

Qu’en est-il réellement ? Est-ce qu’un freelance peut se permettre de jongler entre ses jobs pour les entreprises qui lui permettent de vivre et des projets artistiques qui ne lui rapportent rien ?

J’ai eu ma réponse assez vite. Pile au moment de mes questionnements, les appels de brief étaient beaucoup moins intenses, les briefs se faisaient plus rares et nos journées commençaient à se libérer.

En fait, Matthieu l’avait prévu. Chaque année, cette période de fin juin lui permet de travailler sur des projets artistiques. Passionné des astres et des planètes, il traduit sa vision d’un univers inconnu sur de multiples logiciels jusqu’à une réalisation finale créée par Draw Machine (un bras robotisé qui dessine des images vectorielles).

Je me rends compte alors que Matthieu (en plus des rendus à finir pour la semaine) passait ses week-ends à expérimenter, en prévision de cette période artistique, des effets qui pourraient être ajoutés sur ses tableaux. De la peinture à la 3D, Matthieu a tout envisagé pendant que moi, j’étais crevé de tout le boulot produit de la semaine.
J’ai compris qu’en tant que freelance, si tu veux créer quelque chose qui te plaît, il faut s’y donner à fond. En travaillant non-stop sur les espaces de temps libre au lieu de s’occuper à ne rien faire en regardant des vidéos ou autre, Matthieu a pu définir ce qu’il voulait créer pour ses prochains tests artistiques et comment m’y faire participer.

Nous avons donc passé les dernières semaines à expérimenter, des tags sur des murs illégaux au milieu de Clichy, de la recherche de plugins qui pourraient permettre une traduction des ombres de projets 3D en formes vectorielles, à la création d’espaces pour des meubles de son bureau.
Finalement, le plus important dans tout ce travail était l’aide que je lui apportais sur le choix des plugins et comment utiliser la Draw Machine. Il m’a fait apprendre l’utilisation de celle-ci grâce à de multiples tests 3D et vectoriels, et aussi avec des visioconférences entre ses amis qui utilisent la même machine.

Bref, les dernières semaines étaient beaucoup plus cool car libres. On ne savait pas trop, tous les deux, où on allait chaque jour. On avait tellement de possibilités grâce au travail de préparation de Matthieu les week-ends auparavant qu’on avait un choix illimité de projets artistiques à choisir et de questions à répondre.
La fin du stage et la dernière semaine étaient l’apogée de cette recherche créative autour de la Draw Machine, où on laisse juste la machine travailler à partir de tout ce qu’on a produit les deux dernières semaines, et nous, on regarde tout ce travail prendre vie devant nous. Matthieu a été un super chef de projet, m’a fait découvrir plein de choses, était toujours prêt à m’aider pour la création et des astuces sur les différents logiciels. 

Ce que j’ai appris à travers ce stage, c’est l’importance de la préparation du travail en tant que graphiste, l’importance aussi des contacts, étant donné que Matthieu ne fonctionne que grâce à des contacts (il n’a pas de portfolio, par exemple). Et aussi, le plus important est de faire ce qui nous fait plaisir. Il ne se force jamais dans un projet et quand le projet ne va pas, il le fait savoir aux clients, ce qui permet de créer une relation plus forte avec eux.

Brief sur brief sur brief

Je me suis toujours questionnée sur comment fonctionnait un graphiste freelance. C’est une direction qui m’attire, déjà par la diversité de boulots que peut proposer ce métier mais aussi étant donné que c’est une situation qui est bientôt proche.

Rapidement, j’ai eu ma réponse, c’est les CONTACTS !

Matthieu ne s’arrête pas, il bosse toute la journée sur plein de sujets divers, dans un emploi du temps géré et serré, le tout avec des rendus chronométrés. Et le PIRE, c’est que même quand il ne bosse pas, il bosse. Chaque week-end, il est en voyage à des conférences, conventions, meetings et autres, sur Paris, Marseille, Lyon, où il rencontre graphistes, clients, grosses boîtes et où il distribue ses cartes de visite.

Tout ça mélangé à ces quelques années de boulot qu’il a fait dans la com avant de devenir freelance, il a des centaines de contacts différents, et il tient à rester proche de ses clients, on a l’impression qu’ils sont amis, il rigole avec eux.

Donc, au final, les clients de Matthieu retiennent son nom et le partagent à d’autres futurs clients. C’est cool de voir comment le bouche à oreille marche dans ce monde, comment on passe d’un pote à Matthieu qui a besoin d’un logo, à une petite boîte, à une énorme entreprise type BNP Paribas ou Bouygues.

Le problème (qui n’en est pas un) c’est que maintenant, en une semaine, on enchaîne les briefs ! Tu viens juste de terminer un projet que, d’un coup, deux autres viennent d’être reçus. À un point que je me demande comment faisait Matthieu avant sans mon aide.

Cette diversité de projets vient jouer aussi dans mon sens, on se les partage, à un point que sur certains projets j’ai presque bossé entièrement seul dessus (toujours sous l’œil de Matthieu qui vient me conseiller sur les rendus finaux et les petites modifs à faire).

Tout ce travail en solo me permet de placer toutes mes connaissances dans des projets réels et me permet de me rendre compte surtout de la diversité des clients. Je me rends compte qu’il n’y a rien vraiment de compliqué, que j’ai déjà toutes les cartes en main, qu’il me manque juste le petit truc, l’œil qui me permet de voir les petits détails que Matthieu, lui, voit en un seul visionnage.

Actuellement, le plus énervant, c’est de ne rien voir de concret en dehors de mon écran. La grande majorité des projets sur lesquels on bosse ne sont pas encore utilisés par les clients ou postés sur les réseaux, et les différentes identités visuelles sur lesquelles on travaille sont toujours soit au début, soit interminables avec des clients qui ne savent pas ce qu’ils veulent, donc on n’a encore rien imprimé, ni cartes de visite, ni affiches.

Les dernières semaines ont été chargées en boulot, et donc sont passées vite, mais en tout cas, cette insertion dans la création réelle avec tous les enjeux entrepris par celle-ci m’a permis de me rassurer. Même quand je fais une erreur en interprétant mal la vision du client, je ne perds rien et le client non plus, lui permettant de préciser sa vision et moi de repartir sur les anciennes bases du précédent boulot pour mieux répondre à la demande.

Non-stop visios dans 7 Maison

Depuis maintenant deux semaines, je travaille avec le graphiste Matthieu Poli, dans son studio Maison 7, qui se trouve dans sa propre maison à Clichy ! Ici l’espace est divisé en 3 grandes zones, le sous-sol est réservé à l’atelier de création de Matthieu Poli, on y retrouve un grand bureau, très lumineux par un puits de lumière large au-dessus de son bureau. Il y a tout un espace réservé à ses drawing machines, avec lequel il réalise ses productions artistiques. Le rez-de-chaussée et le premier étage est réservé à l’espace de vie et le deuxième étages est le bureau de Camille Poli, la femme de Matthieu et co-créatrice de Maison 7 qui est la responsable communication du studio.

J’aide majoritairement Matthieu Poli à travers ce stage mais je viens aussi en aide sur certains projets sur lesquels Camille travaille, surtout lui permettant d’avoir un œil nouveau et différent sur ses productions. Je suis affecté au sous-sol, sur le même bureau que Matthieu, nous permettant de travailler sur les mêmes projets tout en nous donnant chacun nos retours en live !


(Zone de travail et bureau de Matthieu poli)

Les projets sont riches, justement c’est ce que je recherchais ! Une diversité dans le travail, on bossent soit pour des grosses agences qui refont leurs identité au complet, soit pour des motions pour un post Instagram, on travail sur de la recherche de logo, sur des productions vidéos pour des documentaires et enfin des projets plus artistiques qui sont personnel à Matthieu, où on travail sur ses tableaux, sur son projet TALLY ou sur de la 3D en lien avec le tiers-lieu le FAR que j’ai mis en place lors de premier stage pour la mise en place de stands ou de lieu de vie (par exemple mettre en scène le puits de lumière en face de son bureau avec des projections sur une forme en bois dans une idée de miroir infinie). Les visioconférences sont aussi très importantes, à chaque étape de développement d’un projet, Matthieu organise des visios rapidement avec les clients pour présenter le travail et ré-axer si besoin. Il garde un lien très proche avec les clients, s’ il n’est pas sûr d’un micro-détail, il appelle directement le client pour qu’il puisse clarifier les points en question, on n’avance jamais à l’aveugle. Matthieu me fournit aussi une diversité d’outils et vu que la rapidité est la clé de son travail, il me force à utiliser des raccourcis clavier que je ne connaissais pas, tout en m’apprenant pleins de petites techniques sur les logiciels Adobe, rendant ma productivité et mon efficacité bien plus rapide. Il me fournit aussi une formation Blender me permettant d’apprendre à faire du photoréalisme.

(Création motion pour la story du magazine Sloft)
Finalement, en deux semaines j’ai déjà énormément appris. J’ai appris à parler aux clients, lors de visioconférences, car Matthieu me pousse à venir parler des étapes sur lesquelles j’ai moi-même travailler. J’ai aussi appris à perfectionner la manipulation des outils d’Adobe.

Matthieu est un très bon professionnel qui sait mettre des limites aux clients et poser des dates pour chaques étapes de créations, sur un tableau qu’il garde toujours ouvert et surtout il sait faire un équilibre entre le travail qu’il me demande, où me laisser en autonomie et me poser la question sur comment je vois les projets et mes avis sur les différentes productions.

Ce stage risque d’être riche et donne envie de voir quels autres différents projets et clients nous attendent.