Adaptabilité des visuels

Travailler dans le pôle communication pendant ce stage m’a inculqué plusieurs choses : la plus importante pour moi à été celle de l’adaptabilité de ce que nous produisons au quotidien. En effet, derrière un poste uniquement consacré à l’illustration se cachait en réalité une demande d’une certaine flexibilité. 

Lorsqu’un projet était annoncé sur un certain format (vidéo par exemple), tout une étude était lancée sur les dimensions et sur le rendu final de ce dit-visuel. Pour prendre un exemple un peu plus spécifique, lors de la création d’une vidéo faite à partir d’un assemblage de courtes animations réalisées sur Photoshop, tout était conçu sur un format par défaut de 1920 x 1080px ; que ce soit aussi bien pour les visuels en animation que pour la vidéo finale. Cependant ce projet de publicité ne s’est pas arrêté là : s’en est suivi une demande pour une transformation tout d’abord dédiée à un post Instagram (1080 x 1080px), ce qui impliquait le déplacement de certaines informations, ainsi qu’un second montage de la vidéo (plus courte pour convenir à la limite temporelle ainsi que la limite de poids imposée par la plateforme). Puis, le projet c’est encore une fois transformé pour convenir, cette fois-ci, à un format 1080 x 1920 px, dans le cadre d’une story.

Un projet doit donc pouvoir s’adapter à tous les types de format, et il s’agit là d’un principe que nous devons anticiper dès le début de la création dudit visuel, puisque parfois la nécessité d’adapter une vidéo à un format en longueur ne vient que plus tard. Dans certain cas, ce changement de format peut même s’avérer compliqué, si l’organisation au préalable n’a pas été assez efficace (dans le cas où on pourrait être amené à perdre des documents par exemple). Mais de manière générale cette transition entre des formats diamétralement opposés n’est jamais impossible, et peut même nous pousser à être plus inventif, voir à utiliser d’autres techniques pour compenser. Finalement, ne serait-ce pas tout simplement une nécessité que de devenir plus “inventif” dans le monde de l’entreprise ? Il s’agirait donc, pour moi, de devenir plus “réactive” ainsi que “flexible”, puisqu’il ne s’agit pas de produire sans rien questionner au préalable, de façon mécanique. En effet, ce stage m’a beaucoup appris en terme de projection : quelle nouvelle vie pouvons nous donner à ce visuel ? comment le transformer en vidéo ? comment le transformer en post pour Instagram ? Chaque image peut et doit être envisagée sous plusieurs formes, pas seulement dans une démarche de “recyclage”, mais plutôt pour apporter un fil conducteur, une cohérence entre les plateformes de communication. Ainsi, un grand soin devait être accordé aux documents originaux, aux liens entre les dossiers, pour qu’une modification du format en cours de route ne soit pas totalement inenvisageable. 

Cette démarche de toujours questionner les visuels que nous produisons m’a également conforté dans l’idée que chacun de nos projets réalisé chez nous, ou en cours pouvaient être modifiés, transformés, et que le rendu n’était pas toujours sa forme finale, une chose que je n’avais jusqu’à lors pas l’habitude d’exercer pour moi-même.

Organisation et responsabilisation

La question de mon temps de travail a été évoquée tout au long de mon stage. Dès qu’un nouveau projet était annoncé, ma tutrice me demandait de communiquer le temps que j’estimais pour produire certains visuels. L’estimation devait donc se réaliser avec pour seul élément de comparaison les différents projets faits en classe. Cependant, un décalage existe toujours entre la théorie et la pratique : les horaires étant bien différentes, il était complexe de vraiment donner une fourchette de temps dans laquelle tout aurait été réalisable. Les missions s’accumulent et c’est en fonction de l’urgence de ces dernières que le planning s’établit ; mais c’est surtout ma tutrice qui me laissait la responsabilité de leur présenter une date de rendu pour les projets plus importants. Je m’imposais donc mes propres deadlines, que je devais respecter, et devait leur annoncer lorsque les missions s’enchaînaient trop rapidement. J’étais donc majoritairement responsable de mon rythme de travail (surtout si l’on prend en considération qu’il s’agissait là de télétravail uniquement).

Cette organisation était plus ou moins mise à mal par le fait que toute l’entreprise fonctionnait et produisait dans l’urgence : dès qu’une mission plus importante tombait, le reste était mis en pause pendant un temps indéterminé, ce qui était assez perturbant au début du stage : plusieurs visuels pouvaient donc être en cours, sans qu’aucun ne soit fini, et dans de rare cas, certains étaient abandonnés, jugés moins importants que les autres.  Le planning pouvait également être modifié par la communication mise en place en télétravail : tout se faisait par mail. Les visuels passaient de ma tutrice à la direction (pour les projets majeurs) et pouvaient donc prendre un certain temps avant d’être validés. Enfin, sans contact “direct”, des quiproquos pouvaient arriver entre temps entre les différents interlocuteurs. 

Même si j’étais plus ou moins responsable de mon planning, ce que je n’aurais jamais cru possible, en temps que simple stagiaire, j’étais également tenue responsable de mes productions : la question de la signature a émergée. Ma tutrice m’avait demandé de signer certains de mes visuels, surtout ceux qui avait comme destination les réseaux sociaux. Si bien évidemment l’ajout du logo de la marque sur les projets était une évidence pour moi, le fait de pouvoir y apposer une signature était un concept qui m’était assez étranger, car pour moi, il n’existait tout simplement pas de “droit d’auteur” en entreprise. C’est donc ajouté à tout cela une certaine responsabilité, car certains visuels étaient maintenant liés à mon nom.

Le fait de pouvoir non seulement “mettre en place” son planning (ou plutôt de s’organiser comme on le sens en fonction de ses capacités) mais également de pouvoir se réapproprier son travail, même au sein d’une entreprise, a eu clairement pour conséquence de me responsabiliser, de donner une valeur concrète et de pouvoir estimer mon temps de travail sur certains projets plus efficacement.

Remise en question stylistique au sein d’une entreprise

Pour mon stage de deux mois en illustration, les projets allaient de la création de visuels, à la vidéo, en passant par la création de logos. La diversité des missions m’a tout de suite interpellé, dans le sens où je me rendais compte de l’étendue des activités que pouvaient attendre un illustrateur. De manière général, mon esprit s’était refermé simplement aux illustrations « corporatives », sans prendre en compte à quel point le graphiste et l’illustrateur étaient liés sur le terrain. La frontière étant de plus en plus mince, je me suis mise à faire des recherches de typographies plus poussées pour les accorder aux visuels demandés, et à rechercher des références qui questionnaient plus en profondeur mes choix de compositions. Cependant, c’est après cela que j’ai heurté un mur : comment se renouveler au sein d’une entreprise ?

En effet, la question du flux créatif dans l’entreprenariat m’est tout de suite venu à l’esprit, puisque, malgré la diversité des médias, et des formats, je tournais toujours un peu en rond dans ce que je produisais. Il y avait une variété dans le contenu, mais plus dans le style, et petit à petit une sorte de culpabilité s’est installée : peut-on réellement produire du contenu différent du style qui a déjà été validé par l’entreprise ?

Même si je n’étais pas directement employée, le simple fait de vouloir se réinventer au sein de l’entreprenariat peut nous mettre face à des murs : c’est la question de l’identité de marque. En effet, le fait de devoir adopter les couleurs/ les formes d’une entreprise déjà sur le marché impose une restriction dans tout ce que nous produisons en temps que “créatifs”. Et c’est sûrement pour ça que sortir de sa zone de confort est si difficile dans ce genre de structure : lorsque nous trouvons un point d’accord, pourquoi vouloir chercher ailleurs et prendre le risque que cela ne passe tout simplement pas ? Nous nous retrouvons vite dans une situation où nous ne produisons rien de nouveau, ni pour l’entreprise, ni pour nous. 

Cependant, s’ajoute à cela la question de la collaboration : chaque retour était accompagné de précisions sur la demande initiale, ou dans certains cas, ce que recherchait la direction. Il n’était souvent question que d’une typographie qui n’était pas assez lisible ou assez douce à l’oeil du consommateur, mais cet esprit de collaboration aide à faire émerger de nouvelles idées, de nouvelles pistes de réflexion. Les retours permettent d’avoir un point de vue plus externe : que penserait un personne qui n’est pas forcément réceptive au graphisme de manière général ? Nous sommes donc présenté à un avis plus réaliste. Les typographies se font plus visibles pour les stories Instagram qui ne sont lisibles que pendant un lapse de temps réduit et le blanc tournant entre les informations se fait plus grand. Pendant ce temps là, les fins de journées étaient animées par des projets plus personnels. Les petites découvertes que nous pouvons faire par le biais de ces moments-là peuvent être réintégrés à notre travail, petit à petit.

Le stage nous met dans des conditions réelles et nous confronte à une clientèle qui s’est déjà habituée à une certaine image de marque. Nous pouvons toujours nous réinventer en questionnant cette base réfléchie au préalable par l’entreprise et c’est le fait de devoir conserver cette balance entre notre identité (enrichie par nos projets personnels)  et la leur (identité visuelle et la collaboration) qui fait que l’exercice devient vraiment enrichissant.