Travail en autonomie et problèmes de communication au sein d’une entreprise

La crise sanitaire que nous avons vécu a obligé la plupart de la population de travailler en télétravail. C’était donc une occasion pour nous, apprentis graphistes, d’expérimenter cette nouvelle façon de travailler. Cela nous pousse à être autonome étant donné que nos tuteurs ne sont pas physiquement à côté de nous pour nous guider au mieux. Pour ma part, je me suis rendue compte que mon stage se déroulait au ralenti et que j’avais bien trop d’autonomie.

Le premier défi qui s’annonçait était donc de gérer au mieux son temps pour ne pas s’éparpiller, tout au long de la semaine. Le problème est que cela était assez difficile étant donné qu’il y avait souvent un long laps de temps entre le rendu de mon travail et leurs retours. Au départ j’étais plutôt perturbée par cette longue attente mais avec le temps j’en ai profité pour avancer mes projets personnels ou alors faire davantage de propositions pour leur projet. Travailler en autonomie est bien à condition qu »on ai des horaires fixes (pour ma part j’ai besoin qu’on établisse un emploi du temps fixe), un planning, qu’on puisse faire des réunions plus souvent, faire le point ensemble, mais ce n’est pas le cas. De plus, c’est plus difficile pour moi de me motiver à travailler alors qu’il n’y a pas de vrai échange entre moi et mes tuteurs. C’est perturbant parce que parfois j’aimerai avoir plus d’aide, plusieurs avis pour pouvoir m’améliorer vraiment, alors que là je dois vraiment me faire confiance à 100%.

Néanmoins, ce stage m’apprend à travailler en totale d’autonomie, c’est donc enrichissant car j’ai l’habitude de demander conseils à mes professeurs, ou même à ma famille ou collègues, alors que là je dois me fier à mon propre « instinct ».

Cette autonomie et ces moments de silences m’ont permis de me découvrir un peu plus en tant qu’apprentie graphiste. Mes tuteurs n’étant pas des graphistes, cela rendait le contexte de travail particulier. Il était parfois difficile de se mettre d’accord avec eux sur plusieurs choix, que ce soit à propos de la typographie, les couleurs, les illustrations… j’ai dû adapter, modifier mes « goûts » pour des personnes qui ne travaillent pas dans le graphisme, qui sont comme des clients, avec un regard extérieur. Cela est intéressant puisqu’une fois dans le monde du travail, nous allons devoir exercer nos compétences pour un public pas toujours initié au graphisme. Je me suis cependant posée une question, par rapport à tout cela, faut-il imposer son avis, ses aspirations et ses idées de graphiste en expliquant pourquoi nous avons fait ces choix, pourquoi il est important de laisser une composition respirer par exemple (et ne pas la remplir de fioritures) ou faut-il appliquer à la lettre les souhaits du client ? La dernière option semble plus facile et accessible, mais elle ne nous apportera rien, pas de satisfaction, on ne sera surement pas contents du résultat final. Au départ j’ai malheureusement choisi la première option car je n’osais pas imposer mon avis, puisque ce sont mes supérieurs. Maintenant, j’arrive à mieux à communiquer mes intentions et mes choix graphiques, mais cela reste un travail difficile car nous ne sommes que des étudiants et porter notre voix n’est pas si facile dans ce milieu… Dans le cas présent il ne s’agit pas de faire un stage dans une agence de graphisme, mais dans une école qui accueille des étrangers. Il faut d’autant plus respecter le choix de mes tuteurs (étant donné que l’un des deux est directeur de l’école). Je dois donc faire attention aux messages et au ton adopté, afin que les différents supports de communication soient compréhensibles par tous les élèves.

La construction d’une charte graphique

Je vais vous parler de la construction de la charte graphique de l’école Edam. Lorsque l’on travaille pour une entreprise, une école ou tout autre commanditaire il est important de prendre en compte son image, respecter le message ou l’idée, l’atmosphère que souhaite véhiculer l’organisme en question à une cible bien précise. Cette identité se doit d’être forte et évocatrice. Elle sera ensuite déclinée sur plusieurs supports amenant ainsi à la création d’une charte graphique web et une charte graphique print. Cependant, ce n’est pas toujours dans ce sens que cela fonctionne.

Tout d’abord, travailler pour une école est une nouveauté pour moi, et j’ai dû me mettre dans le bain très rapidement. Edam est une école qui donne des cours de français à des étrangers qui viennent du monde entier. Elle propose également d’autres formations ( bachelors MBA, DBA), mais mon stage se concentre principalement sur la partie cours de français. Les élèves qui s’inscrivent à Edam ont des nationalités multiples, dès lors les notions de diversité et de mixité deviennent essentielles et doivent être prises en compte dans l’image de marque de l’école. Chaque projet doit pouvoir être compris par un maximum de langues, parfois il faut travailler un projet en plusieurs langues, avec des images différentes qui vont toucher plus ou moins la cible visée, pour le public japonais l’on s’adresse par exemple on va utiliser des codes qui leurs parlent, un ton plus léger et plus « kawaii », en référence à l’animation japonaise. La tranche d’âge de la cible est entre 20 à 35 ans le ton que nous avons décidé d’adopter est un ton joyeux, avec un code couleur et des images qui parlent à cette tranche d’âge (des couleurs vives, des photographies d’étudiants souriants).

Au départ, j’ai décidé qu’il serait préférable de faire des moodboards afin de mieux structurer les différentes idées qui me viennent, avant de se lancer directement dans la réalisation des projets. Cependant, je n’avais pas de données suffisantes pour construire un plan solide. J’ai donc essayé de m’imprégner de l’univers scolaire afin d’en tirer quelque chose de plus dynamique. Ma charte graphique était au départ pauvre en idées à cause d’un manque d’informations (et de communication entre moi et mes tuteurs). Je sentais aussi qu’il fallait que j’entame un projet afin de correspondre au mieux aux attentes de mon maître de stage. Comme ils n’ont pas de graphistes, leur charte initiale était très sage et pas vraiment dans l’air du temps. Il fallait donner envie aux étrangers d’intégrer Edam, en prenant en compte la concurrence. Cette dernière utilise souvent des tons froids, un bleu foncé, avec une dynamique très sage. Après la validation de mes premières idées nous avons commencé un projet.

Ma première commande était la refonte d’un de leur flyer, et dès lors j’ai suivi ma charte graphique, et je suis partie dans des tons froids, vert fluo et violet, dans un style minimaliste, parce que dans ma tête être graphiste aujourd’hui les tendances graphiques d’aujourd’hui riment avec l’épurement. Très vite en faisant ce style de mise en forme graphique nous nous sommes rendus compte que ces codes ne correspondent pas à l’image de l’école qui est accueillante et chaleureuse.  C’est en travaillant sur un autre projet en parallèle sur un nouveau medium (une vidéo) que j’ai par la suite rectifié le tir en adoptant des couleurs plus joyeuses et douces, moins tranchantes, un bleu pastel et un orange vif, en intégrant des petites illustrations et en remplissant les espaces vides (qui leur faisaient si peur). C’est à ce moment que je me suis rendue compte que dans le cas présent, réaliser une charte n’a pas été vraiment utile puisqu’elle se dessinait au fur et à mesure de l’expérimentation. Ces faits se sont confirmés par la suite étant donné que mes tuteurs ont décidé d’avoir une charte graphique qui varie selon les supports. Par exemple, pour les vidéos ils voudraient un certain code couleur et pour la partie print une autre code couleur. Au départ j’étais réticente car j’avais peur qu’on perde l’identité de l’école à force de changer les couleurs mais au final cela l’incarne bien, il y a autant de couleurs que d’origines, donc le message passe bien. Ce que je retiens de cette expérience c’est qu’une charte n’est pas obligée d’être fixée dès le départ mais c’est en expérimentant que l’on se rend compte si elle marche ou si au contraire elle ne correspond pas à l’objectif souhaité.